MARS 2016

« Ukraine : les masques de la révolution » : le coup du chapeau de Paul Moreira

« Les Américains n’ont pas été informés de la vilaine réalité de la révolution ukrainienne en 2004 (…) qui a installé un régime soutenu par les Etats-Unis, farouchement anti-Russe, appuyé par des groupes armés néo-nazis. Mais un documentaire français a osé exposer cette dure réalité » écrivait Consortium News1.
Ce documentaire, c’est le film de Paul Moreira « Ukraine : les masques de la révolution » qui, malgré de fortes pressions internationales et une vague de protestations de la part « d’intellectuels » français a été diffusé, par trois fois, sur la chaîne française « Canal+ ».
Le journaliste, cofondateur de l’agence Premières Lignes, s’est penché sur l’après-révolution ukrainienne. En trois parties, il déconstruit l’image bien trop lisse d’un mouvement qui a enjoué l’Europe de l’Ouest, alors que trois mouvances néonazies présentes aux côtés de la population pro-ukrainienne ont infiltré le pouvoir, avant de devenir petit à petit des forces militaires. Images et témoignages à l’appui, cette enquête dénonce ce crime impuni de 45 pro-Russes brûlés vifs à Odessa, en mai 2014, mais aussi la complicité intéressée des États-Unis.
A l’issue de sa première diffusion les attaques contre le journaliste réalisateur vont pleuvoir de toute part… Les accusations viendront principalement de deux blogs militants et d’un article violent du journaliste chargé de l’Ukraine dans « Le Monde », Benoit Vitkine.
Malgré ces protestations, la chaîne va décider de rediffuser le reportage et, cette fois-ci, la polémique va naître de l’initiative d’un groupe de journalistes français2. Dans une lettre ouverte à ce dernier, ceux-ci lui adressent une salve de critiques auxquelles le réalisateur a, à nouveau, patiemment objecté. Ils sont « correspondants permanents à Kiev et dans la région, d’autres sont des envoyés spéciaux très réguliers. » Ils ne vont toutefois pas jusqu’à préciser de quel côté de la ligne de front ils se déplacent le plus souvent, sinon exclusivement. Dans cette lettre virulente des journalistes qui veulent faire autorité sur l’Ukraine, il y a l’insulte de « paresse intellectuelle ». Paul Moreira commettrait « un raccourci dramatique lorsqu’il qualifie de « Russes » ou d’ «Ukrainiens d’origine russe » les habitants d’un pays où, en 2016, l’identité ne se définit certainement pas selon le seul facteur ethno-linguistique. » Ces journalistes reconnaissent néanmoins que « Les bataillons volontaires ukrainiens, extrêmement diversifiés sociologiquement, sont composés pour partie d’une composante nationaliste radicale. Ce n’est plus un secret pour personne. »
Pourtant, ces mêmes journalistes se semblaient pas perturbés d’interviewer dans plusieurs de leurs reportages de jeunes femmes ouvertement néonazies, en toute connaissance de cause mais en prenant soin de ne pas le préciser… Tout comme on peut légitimement s’interroger sur leur neutralité puisqu’aucun n’a trouvé utile de présenter les exactions dont sont victimes les Donbassiens… 
Ces journalistes qui se dressent contre le documentaire de Paul Moreira auraient pu au moins avoir l’humilité de reconnaître que leur travail n’avait pas été toujours, loin s’en faut, à la hauteur. Et admettre que le film documentaire de Moreira répond à des lacunes dont ils sont aussi, en partie responsables.
Ainsi, aux détracteurs de Paul Moreira qui l’accuse de « paresse intellectuelle », il nous serait aisé de pouvoir les soupçonner de « malhonnêteté intellectuelle ». Mais nous leur concédons qu’il est bien difficile d’être neutre quand on choisit de se rallier au camp atlantiste, sous peine d’être condamné de propagande pro-russe.
Au milieu de ce barrage médiatique, Paul Moreira est toutefois arrivé à faire passer, par trois fois, son message et c’est sans doute là le plus important. Bravo Monsieur Moreira pour ce coup du chapeau et merci !

1Le site Consortium News est dirigé par Robert Parry, une légende du journalisme d’investigation américain. C’est lui qui a révélé pour Associated Press et Newsweek, le Iran Contragate donnant naissance à l’historique Commission Kerry. En 2015, son site, Consortium News a reçu le prestigieux IF Stone Award.

2La lettre ouverte contre Paul Moreira était signée de Ksenia Bolchakova, Yves Bourdillon, Gulliver Cragg, Marc Crepin, Régis Genté, Laurent Geslin, Sébastien Gobert, Paul Gogo, Emmanuel Grynszpan, Capucine Granier-Deferre, Alain Guillemoles, James Keogh, Céline Lussato, Elise Menand, Stéphane Siohan, Olivier Tallès, Elena Volochine, Rafael Yaghobzadeh.

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