FÉVRIER - MARS 2020

Boris Johnson, le conquérant

par Marie-Simone POUBLON


Le monde entier connait Boris Johnson (Bojo ou Beau Jo, c’est selon !) comme homme politique provocateur, écrivain, journaliste, producteur d’une série documentaire télévisée, orateur de talent et « descendant imaginaire » de Winston Churchill !
Boris, Maire de Londres ne prit la nationalité britannique qu’en 2016 et reste pour tous un yankee de cœur. Loin de nous l’idée de le comparer à son maître à penser Donald Trump avec lequel il s’est un tantinet fâché depuis peu à cause d’un partenariat stratégique avec le chinois Huawei (fâcherie qui ne sera pas à mon sens durable !).
Pour ceux qui le croisent, il est un boute-en-train au franc-parler remarquable, capable de tout sur fond de jovialité, rébellion et provocation. Pour le Parlement européen, il n’est qu’un mauvais sujet. Celui qui ne veut que les avantages sans les inconvénients. Il n’empêche que le meneur du Brexit a réussi son pari : sortir de l’Europe en usant de toute sa détermination et de sa tactique politicienne pour arriver à ses fins. C’est sans doute pour cela qu’on lui reconnait volontiers (même si ce n’est pas vrai) une filiation avec Sir Winston ! (En fait Bojo a une réelle filiation lointaine avec le roi George II couronné en 1727).
Bojo est un poids lourd de la scène politique anglaise ayant su s’attirer les hommages d’une Margaret Thatcher dont on connait le surnom de « Dame de fer » pour ses articles journalistiques. Il provoquait déjà le Parlement européen et son président Jacques Delors sur les travers des institutions européennes en 1990 (rappelons qu’il était correspondant pour l’Europe à Bruxelles à cette époque).
Bojo devient célèbre pour sa résistance à l’Europe et définitivement eurosceptique non sans un humour qui lui vaut cette comparaison avec les sautes d’humour de Churchill ! Il gagne grâce à sa célérité qui le rend populaire auprès des conservateurs britanniques. Déjà réfractaire aux ordres de Bruxelles, il compara dès les années 2005, l’union européenne à l’empire romain dans son livre « the dream of Rome ».
En 2019, il fut le grand gagnant des élections à la tête du parti conservateur pour mener le Brexit malgré les difficultés procédurales et financières que cela représente. Malgré l’opposition marquante au sein de son parti, le référendum citoyen lui donnera raison. Il avait pourtant affirmé en 2016 que son pays « fera toujours partie de l’Europe ».
Oui en effet, mais pas la même Europe. Ce qu’il veut c’est une Europe économique sans le pouvoir institutionnel du Parlement européen sur le Royaume-Uni ! Ses propos controversés ont mis l’accent sur l’institution la jugeant ainsi infantile et immature. Il entendait bien redevenir libre !
Comment ne pas donner raison à Boris Johnson ?
Son objectif, remettre de l’ordre et de la liberté dans ses actions sans se charger du lourd poids de la migration imposée par Bruxelles. Voilà qui fait de lui un être plein de bon sens car n’oublions pas que l’insulaire n’aime pas l’envahisseur !
Bojo apporte une forme de « protectionnisme patriotique » aux britanniques. Fini les règles fiscales et douanières imposées par Bruxelles, tout comme une pseudo éthique humaniste ou environnementaliste. La sortie de l’Union européenne permettra de voter des lois pour les Britanniques. Adieu aux diktats des faiblesses économiques de l’Europe !
D’ailleurs le premier pied de nez aux européistes est effectivement cet accord avec le chinois Huawei pour le réseau 5G du pays1. Avec l’Europe il n’aurait pu faire ce clin d’œil à la zone Asie sans se fâcher avec « les Grands ». Le voilà aux prises avec les jaloux qui le traitent d’enfant gâté et qu’il repousse à coup de pieds aux fesses.
Bojo est sans aucun doute l’homme de la situation comprenant qu’il fallait se libérer du joug de l’Europe.
Il semblerait qu’il soit aussi un homme de stratège tout comme peuvent l’être les Présidents russe Poutine et américain Trump. Les britanniques ne savent sans doute pas encore que leur premier ministre est habile quant à ses relations extérieures avec les Etats-Unis et, ce qui reste encore à confirmer, avec la Russie. Russie avec laquelle il est, pour le moment, toujours « en froid » suite à l’affaire Skripal en 2018. De mémoire, nous n’avions pas vu autant de valses de diplomates expulsés dans les deux pays. Depuis nombre de dossiers politiques les opposent mais le dialogue économique reste ouvert.
Malgré les dossiers et affaires sensibles, pour Boris Johnson le Président russe Vladimir Poutine souhaite « un dialogue constructif » avec le premier ministre anglais.
Alors que l’Europe est constituée de vingt-sept pays, le Président Vladimir Poutine parle lui de « continent » européen. Voilà Bojo courtisé par un stratège d’envergure qui a déjà largement entamé des négociations avec les Chinois.
Vladimir Poutine aurait-il des vues économiques sur l’Europe des vingt-sept ? Chercherait-il des alliances ? Pressentirait-il surtout un renversement de la tendance politique pour ouvrir la voie du dialogue avec d’autres conservateurs ?
Par ailleurs Boris Johnson craindra-t-il de se fâcher avec l’ennemi historique de la Russie, les Etats-Unis ? Les deux puissances n’ayant vraiment pas intérêt à cet état d’hostilité permanente, Bojo leur offre un nouveau souffle, une deuxième voie vers le dialogue.
À n’en pas douter, un dialogue constructif entre les deux pays va en gêner plus d’un.
Les capacités de négociateurs de Boris Johnson sont immenses. La livre sterling a pris son envol à l’annonce du Brexit et les investisseurs attendent impatiemment la croissance. Les conservateurs ayant écrasé les travaillistes permettront à Bojo de prendre toutes les mesures nécessaires pour que sa politique intérieure puisse respirer (notamment dans les domaines de la santé, la sécurité et les infrastructures de transport) avec ce que cela engendrera de dette et de déficit pour le pays. Il est prêt à tout assumer.
Résultats attendus pour le 31 décembre 2020 !

M-S. P.

NOTE

1. https://www.lefigaro.fr/secteur/high-tech/boris-johnson-defie-trump-sur-huawei-20200128

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